Prix Médicis pour Fin de combat en 2020, Karl Ove Knausgaard revient avec En automne, un journal adressé à sa fille Anne, son enfant à naître.
« Au moment où j’écris ces lignes, tu ne sais rien de rien, ni de ce qui t’attend, ni du monde dans lequel tu vas naître. » Sur ces paroles s’ouvre En automne, premier tome du Quatuor des saisons, une tétralogie que l’écrivain norvégien Karl Ove Knausgaard commence à écrire lorsque sa fille est encore en devenir, à l’abri dans le ventre de sa mère. À celle qui va voir le jour, il raconte son quotidien, ce qu’il vit, ce qu’il ressent, ce qu’il pense du monde dans lequel il s’apprête à l’accueillir.
Le caractère fantastique de ce qui nous entoure, que bientôt tu découvriras toi aussi, nous le perdons tous de vue chacun à sa façon. C’est pourquoi je t’écris ce livre. Je veux te montrer le monde tel qu’il est, autour de nous, à chaque instant.

Porté par l’espoir que représente cet enfant, Knausgaard retrouve l’émerveillement originel qui l’animait enfant, lorsqu’il partait découvrir le monde, avant que son attention d’adulte ne se détourne des petites choses du quotidien et que son regard glisse sur elles, les renvoyant à leur insignifiance. Les grenouilles croisées sur une route, les feuilles d’un châtaignier, les couleurs d’une tache d’essence sur l’asphalte, le brouillard qui se forme sur les champs, l’arrivée des dents de lait, mais aussi le sang et l’urine, tout était alors sujet d’émerveillement ou de dégoût, tout était nouveau, donc fascinant. « L’eau, l’air, la pluie, les nuages sont là depuis toujours, eux aussi, mais ils font tellement partie de notre vie que leur caractère immémorial ne nous effleure pas l’esprit ni ne nous émeut.«
Comme il l’avait fait dans le long récit que constituait Mon combat, l’écrivain norvégien porte attention à toute chose, même insignifiante, même repoussante, l’élevant au rang d’objet littéraire, la rendant digne d’être contemplée et commentée. « Ce n’est qu’en procédant ainsi que je pourrai moi-même voir [le monde] » écrit-il. En mêlant les souvenirs d’enfance aux réflexions de l’homme mûr qu’il est devenu, Knausgaard nous invite à un travail d’introspection, nous interrogeant à la fois sur le sens de nos vies et sur notre rapport au monde, à la nature et aux êtres vivants.
Ce livre en agacera certains, d’autres l’encenseront. Knausgaard est un auteur clivant, mais il s’impose livre après livre comme un observateur éclairé des petits riens, un écrivain du réel.
En automne
Karl Ove Knausgaard
Loup-Maëlle Besançon (traduction)
Vanessa Baird (Illustrations)
Editions Denoël, 2021, 272 pages.